Le coup de blues d’Emmie, sage-femme en région parisienne.

C’était il y a un an déjà. Fin brutale de l’histoire, la direction de la clinique annonçait la fermeture de la maternité pour Noël. Ni plus ni moins, froidement, bon débarras…

C’est malheureusement devenu monnaie courante, un triste exemple parmi tant d’autres. Sentiment d’impuissance, d’injustice, de mépris, larmes refoulées… Plus qu’une claque, ce fut comme une condamnation. Un lieu de naissance condamné à mort, et des vocations en sursis.

Nos petites maternités se meurent. Comme un virus, le fléau se répand, inexorablement. Autour de moi, ici et ailleurs, les structures à taille humaine ferment. Manque de moyens, manque d’obstétriciens, toutes les raisons sont bonnes, mais la volonté est mauvaise, indéniablement ! Au-delà de nos frontières, ils ont compris : des alternatives se développent, des plateaux techniques s’ouvrent aux sages-femmes libérales, des maisons de naissance apparaissent, l’accouchement à domicile s’envisage…

Mais chez nous, on ferme. On éloigne les femmes des salles d’accouchement, on regroupe les structures, on médicalise, on travaille à la chaîne. On nous vend comme modèle des accouchements « Babyboom » standardisés, caméra inside, dans une belle usine bien rodée. Moi j’y perds le sens de mon métier, et je ne suis pas la seule… Ce beau métier de sage-femme, je voulais me l’approprier, le valoriser. Trop heureuse à la fin de mes études de quitter ce CHU de niveau 3 où l’on ne sait pas accoucher sans protocole !

J’ai choisi d’exercer avec plaisir, de privilégier l’eutocie sans ignorer la pathologie, dans cette structure de niveau 1, à taille humaine. J’aimais prendre le temps d’accompagner, de comprendre, de recevoir et de donner, j’aimais partager discrètement ce moment unique de la vie d’une femme, d’un couple. J’aimais me dire secrètement qu’on se souvient toute sa vie de la personne qui a mis au monde son enfant. Quelle belle récompense. J’aimais être au service de l’autre, apporter mes compétences… et oublier pour une fois la rentabilité !
Mais je crois que le virus est bien là, au cœur du système de santé, et il fait déjà des dégâts. Rentabilité et service humain sont incompatibles. L’un nuit à l’autre. Le système de santé est malade…

Aidons les cigognes, c’est urgent, elles vont se perdre!

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