3,6 pour 1 000 accouchements, c’est le nombre d’admissions en soins intensifs des femmes enceintes et en post-partum. Plus de la moitié d’entre elles ont eu une césarienne. Si ces admissions ne sont pas remises en questions en ce qui concerne les hémorragies obstétricales et les troubles hypertensifs pendant la grossesse, une réflexion semble émerger en ce qui concerne d’autres pathologies qui nécessiteraient davantage une adaptation de la surveillance plutôt qu’une hospitalisation en soins intensifs. Réflexion issue d’une étude suivie sur quatre années, qui semble indiquer une légère baisse des hospitalisations mais une nette hausse de la gravité des cas.

Grossesses plus tardives, déclenchements plus nombreux, césariennes plus fréquentes : l’évolution du profil des femmes enceintes et des pratiques obstétricales expliquent sans nul doute pourquoi les hospitalisations en soins intensifs pendant la grossesse et en post-partum sont plus fréquentes. Une étude épidémiologique descriptive s’est penchée sur cette évolution du nombre d’admissions en soins intensifs entre 2006 et 2009 pour évaluer les diagnostics principaux, la gravité et les caractéristiques cliniques. Cette étude rapporte 11 824 hospitalisations en soins intensifs pour 3 262 526 accouchements (3,6 cas pour 1000 accouchements).

Les parturientes concernées correspondaient globalement à l’âge moyen de la grossesse en France, soit 30,5 ans mais 21,5 % d’entre elles avaient plus de 35 ans. Les hospitalisations ont eu lieu pendant l’accouchement ou durant la période du post-partum (62,8 %). Les césarisées représentaient 57,7 % des femmes hospitalisées en soins intensifs. Les raisons ? Le plus fréquemment les hémorragies obstétricales (34,2 %) et les troubles hypertensifs durant la grossesse (22,3 %).

Les critères de l’étude

La gravité a été évaluée par 4 marqueurs : le taux de mortalité (154 décès soit 1,3 %), la durée moyenne de séjour en USI (3,0 jours ± 0,1 j.), l’indice de gravité (simplified acute physiologic score II ou SAPS II) de 19,7 en moyenne et le code SUP REA (proportion de patientes ayant un SAPS II supérieur à 15 et nécessitant le recours à une procédure spécifique en rapport avec une défaillance d’organe) : 23 %.

Hémorragies et hypertension en cause

Au cours des quatre années de durée de l’étude, le taux d’admissions en soins intensifs en rapport avec la grossesse a diminué, passant de 3,9 à 3,4 pour 1 000 accouchements (p < 0,001) alors que, dans l’ensemble, la gravité a augmenté avec des séjours plus longs, un SAPS II plus élevé et une plus grande proportion de code SUP REA (tous p < 0,001). L’analyse par diagnostic principal montre que les hémorragies et les complications hypertensives admises en soins intensifs sont significativement plus sévères en 2009 par rapport au début de l’enquête. L’embolie de liquide amniotique est responsable de la mortalité la plus importante (36 %).

Quelle alternative aux soins intensifs ?

Les auteurs de l’étude ont également mis en exergue le grand nombre d’admissions pour embolies pulmonaires, soulignant que cette complication nécessite pourtant peu d’équipements ou de soins spécifiques de réanimation (6,9 % de codes SUP REA pour les embolies cruoriques comparativement à 64,2 % pour les embolies amniotiques). Cependant, même si les embolies pulmonaires sont rarement fatales, elles représentent la deuxième cause de mortalité directe maternelle en France pendant ces 4 ans. Les auteurs de l’étude s’interrogent sur la difficulté voire l’impossibilité d’estimer la balance bénéfices-risques entre trop d’admissions en soins intensifs et un traitement et une surveillance inadéquats.

En conclusion de l’étude, une question s’impose : comment organiser la prise en charge appropriée pour les femmes souffrant de pathologies liées à la grossesse qui ont prioritairement besoin d’une surveillance continue, mais pas forcément de soins intensifs ?

Sources Journal International de Médecine / Dr B. Jourdain. Etude Chantry A et coll. : Pregnancy-Related ICU Admissions in France: Trends in Rate and Severity, 2006–2009.

Laisser un commentaire