Les bébés nés de mères diabétiques, prématurés, hypo ou hypertrophes bénéficient d’une surveillance de la glycémie en maternité pendant 24 à 48 h afin d’éviter les lésions cérébrales imputables aux hypoglycémies néonatales. Le seuil de la glycémie indiquant l’apport d’un supplément de sucre (per os ou par voie IV) a été progressivement relevé jusqu’à 0,47 g/L (2,6 mmol/L), considéré comme seuil de sécurité en dessous duquel un traitement s’impose. Une équipe néozélandaise vient de publier les travaux d’évaluation de ce seuil de sécurité. Les éclairages du Dr Jean-Marc Retbi (JIM).

La méthodologie de l’étude

Deux tiers des membres d’une cohorte de NN à risque (404/614) ont eu à la fois une surveillance intermittente de la glycémie sur sang capillaire jusqu’à 7 jours de vie au maximum et un bilan à 2 ans afin de rechercher des troubles neurosensoriels (BSID-III et examen de la vision, l’audition ayant été testée à la naissance) et des troubles exécutifs (quatre tests et un questionnaire, le BRIEF-P).

La glycémie d’un peu plus de la moitié des NN (53 %) est descendue au moins une fois en dessous de  0,47 g/l, ce qui a motivé une intervention. Les récidives ont été rares, mais le monitorage simultané du glucose interstitiel (une mesure toutes les 5 min), analysé en différé, a révélé des taux < 0,47 g/l méconnus par les contrôles sanguins et des hypoglycémies persistantes après intervention.

Des résultats encourageants…

A 24 mois d’âge corrigé, les enfants qui avaient eu une glycémie < 0,47 g/l, et qui avaient donc été traités, n’avaient pas plus de déficits neurosensoriels (retard de développement, paralysie cérébrale, cécité ou surdité) ou de troubles exécutifs que ceux dont la glycémie était restée tout le temps > 0,47 g/l. Leur risque relatif [RR] de déficit neurosensoriel était de 0,95, avec un intervalle de confiance à 95 % [IC 95%] de 0,75 à 1,20 (p = 0,67), et leur RR de troubles exécutifs de 0,92, avec un IC 95 % de 0,56 à 1,51 (p = 0,74).

Ni la glycémie la plus basse, ni le nombre d’épisodes d’hypoglycémie (incluant les taux < 0,36 g/l ou 2 mmol/l), ni le nombre des événements combinés de taux bas dans le sang et le tissu interstitiel, au cours des 7 premiers jours de vie, ne pouvaient prédire quels enfants auraient plus tard des troubles neuro-développementaux. L’aire comprise entre les valeurs basses du glucose interstitiel et le seuil de 0,47 g/l, « l’incrément interstitiel négatif du glucose », ne pouvait pas non plus prédire quels enfants présenteraient des troubles neuro-développementaux.

Deux sortes de résultats étaient troublants : les enfants dont la glycémie était descendue sous 0,47 g/l avaient un score social et un score émotionnel au BSID-III légèrement meilleurs que ceux dont la glycémie était restée > 0,47 g/l (différence moyenne des scores : 3,5 points ; IC 95 % : 0,4 à 6,5 ; p = 0,02). Les glycémies > 0,72 g/l après traitement d’une hypoglycémie tendaient à être associées avec plus de troubles neurosensoriels, mais on ne peut exclure des facteurs de confusion.

…mais maintien d’un seuil de sécurité

Cette étude n’a pas réussi à démontrer qu’un seuil de glycémie fixé à 0,47 g/l protégeait le cerveau du NN. Tout ce qu’on peut en conclure c’est qu’une hypoglycémie néonatale asymptomatique et transitoire n’augmente pas le risque de troubles neuro-développementaux chez les enfants traités afin de maintenir leur glycémie au-dessus de 0,47 g/l. La valeur de 0,47 g/l (2,6 mmol/l) est un seuil d’intervention, pas un seuil de nocivité pour le cerveau. On peut se demander si elle ne peut pas être un peu abaissée. Les auteurs préfèrent conserver une marge de sécurité importante jusqu’à plus ample informé, leur évaluation s’arrêtant à l’âge de 2 ans.

Sources JIM/ Dr J.M. Retbi/Mc Kinlay CJD et coll. : Neonatal glycemia and neurodevelopmental outcomes at 2 years. N Engl J Med 2015; 373: 1507-1518

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