Les maisons de naissance sont des structures tenues par les sages-femmes qui peuvent accueillir et accoucher les femmes enceintes à bas risque obstétrical. Annexées à une maternité partenaire, elles permettent de proposer des accouchements physiologiques et un suivi de la femme enceinte plus axé sur les échanges humains, tout en garantissant une sécurité optimale. Les maisons de naissance semblent donc être un excellent compromis entre le coté trop technique et parfois déshumanisé de l’hôpital et l’accouchement à domicile.

Dans toute l’Europe, les maisons de naissance sont un véritable plébiscite et ont démontré non seulement un excellent service rendu mais également un haut niveau de sécurité : les accouchements y sont aussi sûrs que dans les hôpitaux. La France accuse un grand retard important dans la mise en place des maisons de naissance, leurs expérimentations sur le territoire n’est effectif que depuis 2015 et la fin de l’expérimentation aura lieu en 2020. Ainsi actuellement les 8 maisons de naissance sont en cours d’expérimentation et elles ont permis de réaliser 0.07% des accouchements en France en 2018. Ainsi une étude épidémiologique a été mise en place par l’Inserm pour permettre d’évaluer la pertinence, mais aussi l’efficacité et la sécurité de ces structures.

Comment fonctionnent les maisons de naissance ?

Au début des années 2000, une mission périnatalité préconisait déjà l’expérimentation de maisons de naissance. Il aura fallu attendre 2013 pour que l’autorisation législative d’expérimentation des maisons de naissance ait lieu et 2015 pour que l’expérimentation commence. Ainsi depuis bientôt 5 ans, 8 maisons de naissances sont à l’essai sur notre territoire. Les maisons de naissance sont sous la responsabilité exclusive des sages-femmes. Ces structures sont obligatoirement contiguës à une maternité pour que les femmes enceintes puissent être prises en charge rapidement en cas de problème. Ainsi seules les femmes à bas risque obstétricales sont autorisées à fréquenter ces établissements. Les femmes enceintes peuvent non seulement accoucher en maison de naissance mais elles peuvent aussi bénéficier des consultations médicales de grossesse et de la préparation à la naissance et à la parentalité. Les femmes enceintes ne sont pas hébergées dans les maisons de naissance et leur retour à domicile s’effectue quelques heures après avoir accouché.

Que dit le rapport sur les maisons de naissance ?

Le rapport a permis d’analyser plusieurs paramètres : la pertinence de ces structures mais aussi l’efficacité des soins prodigués et la sécurité de ceux-ci. 8 maisons de naissance ont ainsi été étudiées : une maison de naissance en Meurthe et Moselle, une en Alsace, deux en Isère, une à Paris, une à Castres, ainsi qu’une en Guadeloupe et une à la Réunion. Pendant l’année 2018, 649 femmes ont été prises en charge dans les maisons de naissance et 506 ont accouché dans ces structures. Les critères d’éligibilité ont quasiment toujours été respectés, ce qui démontre que le dispositif est particulièrement pertinent.

L’efficacité des soins est importante puisque sur les 506 accouchements, on comptabilise moins de 3% de rupture artificielle de membranes et moins de 2% d’épisiotomies pratiquées. La très grande majorité des femmes ont accouché par voie basse (90.5%), un petit nombre a dû accoucher par voie instrumentale (6.5%) et le taux de césarienne a été évalué a 3%.

Les femmes ayant choisit d’accoucher en maison de naissance ont également, dans la très grande majorité des cas (94%), préféré adopter des positions différentes que celle dorsale. L’effort expulsif a été également assez rapide puisque celui-ci a duré en moyenne seulement 22 minutes. Après leur accouchement, les femmes sont restées en maison de naissance en moyenne 3 heures. 22% des femmes ont ainsi été transférées dans les maternités partenaires : dans la grande majorité des cas (87%), le transfert s’est effectué hors contexte d’urgence (prise en charge de la douleur…), les transferts réalisés en urgence (maternels ou néonatales) ont tous été favorables. Le taux de ces transferts est comparable à ceux des études internationales. On peut souligner le fait que les transferts ont concerné surtout les femmes primipares (71%). Le taux de transfert s’est avéré variable entre les maternités. L’efficacité des soins est donc particulièrement importante et le travail de la sage-femme s’inscrit dans la philosophie de l’autogenèse (soins de prévention ayant pour objectif de renforcer la santé et de limiter les interventions et leur iatrogénie associée). Afin d’harmoniser le parcours de ces femmes, de nouvelles recommandations pour les sages-femmes sont préconisées.

En ce qui concerne la sécurité des soins, très peu de complications ont été répertoriées. La majorité des femmes ont pu avoir un périnée intact après l’accouchement et on a dénombré seulement 0.5% de déchirures périnéales au 3ème ou 4ème degré. 1.4% des femmes ont été prises en charge pour une hémorragie sévère du post-partum (pertes sanguines supérieures à 1000 ml). Au total, on compte 6.1% de femmes prises en charges dans la maternité annexée pendant la période post natale, mais aucune femme n’a été accueillie en unité de réanimation ou de soins intensifs et aucun événement grave ou décès maternel n’a été identifié. Seules 2 femmes ont du être réhospitalisées pour une endométrite et une rétention de membrane placentaire. Seuls 1.7% des enfants ont nécessité des gestes de réanimation néonatale (et seuls 0.3% des enfants ont présenté une mauvaise adaptation à la vie extra-utérine à 5 minutes de vie). 6.2% des enfants ont nécessité un transfert en maternité ou néonatalogie. 8 nouveau-nés ont été réhospitalisés et un décès a été comptabilisé.

Le rapport précise que d’autres évaluations permettront de rendre compte de la salutogenèse et de la sécurité des soins prodigués comme par exemple une comparaison avec des accouchements à bas risques réalisés à l’hôpital. Pour l’instant, la comparaison de ces résultats avec ceux connus à l’international montre que les maisons de naissance françaises possèdent de très bons résultats. L’étude suggère également que de nouveaux indicateurs (autres que ceux devant être fournis aux ARS) devraient être mis en place pour étudier et mieux rendre compte de la salutogenèse et de la sécurité de ces maisons de naissance.

Préconisations pour l’organisation des maisons de naissance

Le groupe de recherche, à la fin de l’étude, a émis 5 préconisations pouvant permettre d’optimiser la mise en place des maisons de naissance sur notre territoire. Ces préconisations sont les suivantes :

1. Établir des recommandations pour la pratique clinique (RPC) sur les critères d’éligibilité des femmes pour un accouchement en maisons de naissance.

2. Établir des recommandations pour la pratique clinique (RPC) sur les critères de transferts des femmes et des nouveau-nés vers les maternités partenaires, que ce soit pendant la grossesse ou après l’accouchement vers les maternités partenaires.

3. Ajuster les dispositions législatives et réglementaires pour permettre, à des fins de surveillance épidémiologique, d’enregistrer et d’identifier les accouchements en maisons de naissance dans les bases de données médico-administratives, soit dans le programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI)

4. Définir à partir d’un processus méthodologique validé de consensus formalisé d’experts (DELPHI), les indicateurs qui permettront d’évaluer la salutogénèse et ses effets sur la santé des femmes et des nouveau-nés.

5. Stimuler et financer une étude épidémiologique en population, de type cohorte avec suivi à distance, qui comparerait des femmes à bas risques ayant accouché en maisons de naissance versus en maternité. Cette étude devrait évaluer cette comparaison globalement dans plusieurs domaines : efficacité des soins, sécurité des soins, aspects médico-économiques, étude qualitative sur la satisfaction des femmes et la satisfaction des soignants.

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