En France, la polémique autour de l’accouchement à domicile ne cesse d’enfler avec les quelques radiations de l’Ordre National des Sages-Femmes prononcées depuis quelques années, dont la dernière il y a quelques semaines.

Mais ailleurs, ce mode d’accouchement cocooning est plutôt en augmentation sans effets disciplinaires pour les sages-femmes dans la plupart des pays, notamment les Etats-Unis. Est-ce à dire qu’il est aussi sécurisant qu’un accouchement en maternité ? Une nouvelle étude vient de confirmer la nécessité d’encadrer strictement les profils de futures mères pouvant accoucher chez elles et celui des sages-femmes pouvant les assister.

Aux Etats-Unis où la couverture santé – et notamment maternité – n’est pas la même qu’en France, le nombre des accouchements à domicile est en hausse. Mais pas sans risques. L’absence de couverture santé suffisante oblige parfois des femmes enceintes vivant une grossesse à complication ou pathologique à accoucher chez elles, faute de moyens financiers. Forcément, les résultats en termes de santé néonatale s’en ressentent. Ce qui conduit le Collège des Gynécologues Obstétriciens Américain (ACOG) et l’Académie Américaine de Pédiatrie (AAP) à préciser les critères des patientes à « bas risque » qui peuvent donc envisager un accouchement à domicile, sous condition que les sages-femmes qui assurent le suivi et l’accouchement soient certifiées par le conseil américain d’accréditation des sages-femmes (AMCB), équivalent de notre Conseil National de l’Ordre des Sages-Femm.

Des règles identiques de contre-indication

Vu d’ici, on s’étonne que cette précision soit nécessaire mais il faut considérer que la profession de sage-femme n’est pas unifiée aux États-Unis où ces fonctions sont assurées par des infirmières spécialisées (Hospital-Certified Nurse Midwives, CNM) ou des sages-femmes qualifiées (Certified Midwives CM) accréditées par l’AMCB.

En clair, toutes les sages-femmes qui exercent aux Etats-Unis ne sont pas forcément diplômées selon les règles de l’art. Si la formation et l’exercice diffèrent, en revanche, les situations qui interdisent un accouchement à domicile sont les mêmes qu’en France : pathologie maternelle préexistante ou survenant au cours de la grossesse, présentation du siège, utérus cicatriciel, accouchement prématuré, grossesse gémellaire et grossesse prolongée (≥41SA).

Ce que dit la récente étude

Le Journal International de Médecine du 22 avril nous éclaire sur les résultats périnataux entre 2010 et 2012, en maternité et à domicile à partir de l’analyse des certificats de naissance. Sur près de 12 millions de naissances, 736 000 ont été pratiqués par des sages-femmes en maternité et 56 000 ont eu lieu à domicile, soit 0,71 % des naissances si on inclut les naissances extrahospitalières imprévues. Près des deux tiers de ces accouchements ont été assistés par des sages-femmes non certifiées.

Les sages-femmes à domicile effectuent plus d’accouchements à risque que les hospitalières : trois fois plus de sièges, deux fois plus d’accouchements de patientes avec un utérus cicatriciel et de jumeaux, une fois et demi plus de grossesses prolongées. L’activité des sages-femmes à domicile montre que sur 10 naissances, trois sont des accouchements après 41 SA ; 1 sur 23 chez des femmes qui ont un utérus cicatriciel, 1 sur 135 est un siège et 1 sur 156 une grossesse gémellaire. Globalement, les sages-femmes non certifiées prennent un peu plus souvent en charge les naissances à risque par rapport aux sages-femmes certifiées. D’où la surmortalité néonatale constatées par rapport aux accouchements hospitaliers. Et sans doute aussi parce que les femmes enceintes ne disposant pas d’une assurance santé suffisante pour accoucher en maternité cumulent aussi des facteurs de risques liés à la précarité, notamment l’obésité, les grossesses adolescentes ou tardives, et parfois les addictions.

Une situation très différente de ce qui se passe en France et qui peut rendre parfois incompréhensible l’acharnement à interdire, si ce n’est sur le fonds mais du moins sur la forme, l’accouchement à domicile accompagné par une sage-femme aux femmes en bonne santé qui le souhaitent.

Sources JIM 22/04/2015 / Grünebaum A et coll. : Perinatal risks of planned home births in the United States. Am J Obstet Gynecol., 2015; 212:350.e1-6.

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