Après plus d’une année de crêpage de chignon avec les sages-femmes, Marisol Touraine serait-elle prête à lâcher du lest en offrant aux sages-femmes la responsabilité de pratiquer des IVG médicamenteuses, jusqu’ici uniquement du ressort des médecins ? Une avancée qui couronne des années de lutte pour la reconnaissance de la profession… ou un marché de dupes ? Les avis sont partagés.

A l’occasion des 40 ans de la loi sur l’IVG, la Ministre de la Santé a fait quelques effets d’annonces : le remboursement à 100% de l’IVG, prévu dans la Loi de Santé tellement controversée en ce début d’année, la possibilité de réaliser des IVG instrumentales dans les centres de santé et, cerise sur le gâteau, l’IVG médicamenteuse confiée également aux sages-femmes alors que cet acte était la prérogative des médecins jusqu’ici. De quoi réjouir la profession maïeutique qui s’offusque à juste titre que ses compétences ne soient pas reconnues à leur juste valeur ? Pas forcément…

Pour ou contre ?

Si dans l’absolu, les sages-femmes semblent considérer que cette nouvelle prérogative est plutôt une bonne chose, certaines se demandent tout de même si ce n’est pas faire l’âne pour avoir du son : autrement dit, est-ce possible d’accepter cette nouvelle responsabilité, ce qui en décharge donc les médecins, sans contrepartie ? Et pas que financièrement même si la question reste posée : même acte médical, mêmes honoraires ? Mais la contrepartie, estiment certaines sages-femmes, doit aussi jouer sur la reconnaissance de leurs compétences en matière de contraception, ce qui leur est dénié par une bonne partie du corps médical.

D’autres encore soulignent que c’est un coup de bluff parce que la prescription des IVG médicamenteuses par les sages-femmes, c’est déjà en cours à l’hôpital.Mais en libéral, alors que la profession connaît une récession sans précédent, la délégation de l’IVG médicamenteuse peut paraître (un petit peu) providentielle. Sauf que d’autres voix s’élèvent pour rappeler qu’avant même l’IVG médicamenteuse, la première mission des sages-femmes, c’est la médecine de prévention, dont le suivi de grossesse physio et, avant l’IVG, tout bêtement la contraception, autrement dit le premier recours. Pas sûr en effet que l’IVG médicamenteuse relève de ce créneau. Alors si le premier recours n’est pas accordé, quid de l’IVG médicamenteuse, à part « faire faire des ménages » aux sages-femmes pour dégager les médecins des tâches qu’ils ne veulent plus assurer ? On pourrait débattre longtemps sur l’air du cadeau, empoisonné ou pas.

Le côté positif du droit de prescription de l’IVG médicamenteuse aux sages-femmes, c’est d’aider à la reconnaissance des compétences médicales des sages-femmes. Après tout, si les médecins le faisaient avant, c’est donc que c’est un acte grave, sérieux, compliqué, qui nécessite compétences. Et qui permet aussi de générer un flux de patientes vers les cabinets libéraux, avec cet acte, facteur de confiance, qui permettra aux sages-femmes de se faire connaître auprès du grand public pour le suivi gynécologique des femmes en bonne santé et la prescription de la contraception.

Il y a toujours un bon côté au débat, mais cela n’empêche pas de le pousser plus loin jusqu’à la question controversée de la rémunération et de la reconnaissance en matière de premier recours. Depuis le temps qu’on en parle…

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