En l’absence d’épidémies, le lobby anti-vaccin a réussi à convaincre un nombre toujours plus conséquent de parents que les vaccins présentent plus de risques que les maladies qu’ils préviennent. Résultat, le taux de couverture vaccinale baisse et on voit réapparaître des maladies devenues rares, telle que l’épidémie de rougeole en Californie, le retour de la coqueluche, et, plus exceptionnel mais bien réel, la diphtérie avec le décès d’un enfant de 6 ans le 27 juin dernier en Espagne. la polémique pourrait rebondir avec une étude qui disculpe le thiomersal, conservateur retiré des vaccins à usage pédiatrique dans certains pays donc la France par principe de précaution.

Que répondre aux parents convaincus du lien de causalité entre vaccination et effets néfastes sur la santé notamment les troubles autistiques, voire même mort inexpliquée du nourrisson ?

Une étude apporte des réponses sur le thiomersal, conservateur utilisé dans les vaccins pédiatriques dans les années 90 mais supprimé depuis en France dans les vaccins à usage pédiatrique suivant les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé. Les Etats Unis et quelques autres pays dont la France ont donc suivi cette recommandation tout en reconnaissant l’absence de données disponibles sur la toxicité du produit. A l’exception du vaccin antigrippal inactivé, le thiomersal a été retiré ou réduit à l’état de traces (≤ 1 μg/dose) dans tous les vaccins recommandés chez les enfants de moins de 6 ans. Rappel, le thiomersal est métabolisé en thiosalicylate et éthylmercure. Ce dernier, contrairement au méthylmercure, ne s’accumule pas dans l’organisme.

Ceci étant, la science et notamment la médecine évolue et les dangers d’hier sont parfois minimisés aujourd’hui voire niés demain. Sera-ce le cas du thiomersal ? Fin 2013, la revue Pédiatrics revenait sur la légitimité de cette éviction du thiomersal des vaccins à usage pédiatrique : les auteurs de l’article avançaient que la décision d’abandon du thiomersal, prise dans les années 1990, ne serait plus prise aujourd’hui au vu des données actuelles. Et se disaient favorables au maintien du thiomersal dans les vaccins destinés à des vaccinations de masse. Une nouvelle étude vient apporter sa pierre à l’édifice.

La méthodologie de l’étude

Pour évaluer l’effet éventuel sur le développement neurologique d’une exposition cumulée à de multiples vaccins pédiatriques contenant du thiomersal, les chercheurs ont lancé une expérimentation sur les macaques,  dont le développement du système nerveux suit une trajectoire similaire à celle des humains. Les macaques ont aussi des processus d’apprentissage et de mémoire et des interactions sociales qui imitent ceux observés chez les humains.

Soixante-dix-neuf macaques ont donc été affectés à six groupes de vaccination :

1 – groupe contrôle : injections de solution saline ;
2 – groupe ROR : vaccins rougeole-oreillons-rubéole, qui n’ont jamais contenu de thiomersal ;
3 – groupe TCV : vaccins contenant du thiomersal selon recommandations en vigueur dans les années 1990 mais aucun vaccin ROR ;
4 – groupe 1990 Pediatric : tous les vaccins pédiatriques administrés dans les années 1990, y compris TCVs et ROR
5 – groupe 1990 : vaccins pédiatriques administrés dans les années 1990 sur un calendrier accéléré et
6 – groupe 2008: schéma vaccinal selon les recommandations de 2008, semblable au calendrier actuel.

Le développement a été évalué de la naissance à 12 mois par l’examen de l’acquisition des réflexes néonatals, du développement de la notion de permanence de l’objet (OCP), des tests informatisés de discrimination, de l’apprentissage et du comportement social infantile.

Ce que dit l’étude

Les résultats montrent une évolution similaire des réflexes néonatals et du développement de la notion de permanence de l’objet quel que soit le groupe. On constate même des résultats légèrement meilleurs dans les groupes TCV et 1990, de meilleurs résultats pour certains des tests d’apprentissage et une partie des groupes expérimentaux présente moins de comportements sociaux négatifs que le groupe contrôle.

Certaines analyses suggèrent même un effet bénéfique du thiomrosal, cependant, il n’y a actuellement aucun mécanisme biologique plausible pour expliquer ces associations, qui sont probablement imputables au hasard.

« Cette étude cas-contrôle d’une durée de 5 ans, qui a examiné attentivement les effets des vaccins pédiatriques sur le développement des primates, ne fournit aucune preuve cohérente de déficit du développement neurologique ou de comportement anormal chez les animaux vaccinés », conclut en écho aux chercheurs le Dr Maryvonne Pierre-Nicolas dans le Journal International de Médecine. Sera-ce suffisant pour rassurer vos patients si jamais le thiomersal devait revenir sur le devant de la scène (hors vaccin contre la leptospirose qui en contient encore) ? La rumeur a parfois des effets bien plus persistants et convaincants que les études les plus documentées…

Sources JIM / Curtis B et coll. : Examination of the Safety of Pediatric Vaccine Schedules in a Non-Human Primate Model: Assessments of Neurodevelopment, Learning, and Social Behavior. Environ Health Perspect., 2015; 123. DOI:10.1289/ehp.1408257

Barrett JR : Pediatric Vaccines and Neurodevelopment Primate Study Finds No Adverse Behavioral Effects. Environ Health Perspect , 2015; 123. DOI:10.1289/ehp.123-A156

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