La surveillance du fœtus et la décision de déclencher le travail se fait actuellement au cas par cas, en fonction de la pratique du médecin qui suit la future mère, aucun consensus n’ayant été établi. Une étude publiée récemment dans Le Lancet, TRUFFLE (Trial of Randomized Umbilical and Fetal Flow in Europe), apporte un éclairage sur la pertinence relative des anomalies du doppler veineux (DV) du canal d’Arantius et de la variation à court terme (VCT) du rythme cardiaque fœtal (RCF) dans la décision du timing de l’extraction.

La méthodologie de l’étude

Cet essai prospectif randomisé européen multicentrique a étudié des grossesses singletons entre la 26ème et la 32ème semaine d’aménorrhée (SA) avec un retard de croissance intra utérin (RCIU) sévère (périmètre abdominal diminué < 10ème percentile et index de pulsatilité (IP) de l’artère ombilicale élevé > 95ème percentile).
Les femmes ont été classées en fonction de leur centre d’étude et de leur âge gestationnel (< 29 semaines vs ≥ 29 semaines) et randomisées en 3 stratégies d’extraction en fonction des résultats du monitorage prénatal au moins hebdomadaire : variabilité à court terme (VCT) du RCF diminuée (groupe VCT RCF), anomalies précoces du DV (index de pulsatilité (IP) > 95eme percentile; groupe DV p95), ou anomalies tardives du DV (reverse flow au moment de la contraction auriculaire [onde A négative] ; groupe DV A nég).
 
Les critères analysés ont été la naissance vivante sans déficience motrice (paralysie cérébrale), ni déficit neurosensoriel, ni score de Bayley < 85 à l’âge de 2 ans. L’analyse a été faite en intention de traiter.
Entre janvier 2005 et octobre 2010, 503 des 542 femmes éligibles ont été incluses dans l’étude de monitorage (166 dans le groupe VCT RCF, 167 DV p95 et 170 DV A nég). L’âge gestationnel médian à la délivrance a été de 30,7 semaines (26,1–40,6) et le poids de naissance moyen de 1 019 g (DS 322).

Les conclusions

L’étude a montré un taux moindre d’enfants avec un déficit neurologique quand la décision est dictée par les anomalies tardives au Doppler. La proportion d’enfants vivants sans déficit neurologique a été similaire dans les 3 groupes : VCT RCF (111 [77 %] sur 144 enfants suivis jusqu’à 2 ans), DV p95 (119 [84 %] sur 142), et DV A nég (133 [85 %] sur 157) (p = 0,09). Douze fœtus (2 %) sont morts in utero et 27 (6 %) en période néo-natale. Parmi les survivants, il y a eu plus d’enfants indemnes de déficit neurologique quand la décision d’extraction avait été prise en fonction des anomalies tardives du doppler (133 [95 %] sur 144, intervalle de confiance à 95 % [IC 95%] 90–98) plutôt que du RCF (111 [85 %] sur 131, IC 95 % 78–90; p = 0,005) mais cela s’accompagnait d’une augmentation non significative de la mortalité périnatale et infantile.

Anomalies du doppler veineux fœtal, feu vert pour l’extraction

Ces résultats de l’étude TRUFFLE confirment la notion que les anomalies du doppler veineux fœtal précèdent l’acidose fœtale et l’hypoxie chez la majorité des fœtus ayant un retard de croissance. Ainsi, bien que la différence sur la proportion d’enfants nés vivants sans déficit neurologique soit non significative en objectif primaire, la décision d’extraction des fœtus en retard de croissance basée sur la présence d’anomalies tardives du DV pourrait permettre une amélioration du développement à l’âge de 2 ans.

Sources JIM/Dr Catherine Azoulay/ Lees CC et coll., : « 2 year neurodevelopmental and intermediate perinatal outcomes in infants with very preterm fetal growth restriction (TRUFFLE): a randomised trial. » Lancet, 2015; publication avancée en ligne le 4 mars. DOI: http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(14)62049-3
Editorial: Vora NL et coll., « Delivery of the growth restricted preterm fetus. » Lancet. 2015 ; publication avancée en ligne le 4 mars. DOI: http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(14)62455-7

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