Selon diverses études, la prévention du Syndrome d’alcoolisation foetale se heurterait encore au tabou de l’alcoolisme au féminin. Pour encore trop de professionnel de santé, un petit verre au mariage du cousin ne présenterait pas de risque. Et s’il n’en était rien ? Voici, en 10 questions, l’occasion de faire le tour de la question et des avancées récentes sur les troubles causés par le Syndrome d’alcoolisation foetale.

La forme la plus grave d’alcoolisation foetale concerne le retard de croissance intra-utérin

Faux. Ce n’est qu’une partie des séquelles que provoque le syndrome d’alcoolisation foetale. Malheureusement, la forme la plus grave intègre aussi des malformations des membres, du visage et surtout une atteinte cérébrale.

La France métropolitaine n’est pas concernée par les formes graves d’alcoolisation foetale.

Faux. Contrairement à une idée reçue, les DOM-TOM ne sont pas forcément les foyers d’alcoolisation foetale les plus concernés, d’autant que des observatoires et des platesformes d’action y sont diligentés peut être parce que le sujet y est moins tabou qu’en métropole. L’ARS de l’Océan Indien, par exemple, a initié une plateforme ressource pour la prévention des TSAF en 2015.

Les séquelles du SAF sont multi-factorielles.

Vrai. Ces séquelles varient en fonction de la consommation d’alcool et des autres addictions (tabac, drogues..), de la sensibilité génétique, de la santé physique et psychique de la maman, de l’hygiène de vie de la famille.

Certaines études ont démontré des modifications de l’organisation neuronale suite à une consommation exceptionnelle d’alcool.

Vrai. Les études cliniques font état de dysfonctionnements au niveau des neurotransmetteurs et de la destruction de liaisons permettant de coordonner le fonctionnement des différentes aires du cerveau.

Les conséquences d’une consommation d’alcool pendant la grossesse sont immédiatement perceptibles.

Faux. On considère souvent que le SAF est sous-estimé, car il n’est pas toujours diagnostiqué à la naissance quand il ne s’accompagne pas de microcéphalie ou de malformation. Les lésions cérébrales sont généralement diagnostiquées tardivement (généralement à l’entrée à l’école), lorsqu’on voit apparaître des retards mentaux ou des troubles du comportement.

Si une patiente a consommé beaucoup d’alcool pendant le début de sa grossesse, inutile de faire le forcing pour qu’elle arrête.

Faux. Contrairement aux opiacés où il est dangereux de conseiller le sevrage absolu et pour lesquels un traitement de substitution est préconisé, la consommation d’alcool, elle, doit être stoppée immédiatement quel que soit le stade de la grossesse.

Si votre patiente arrive avec le conseil d’un autre professionnel de santé qu’un petit verre exceptionnellement ne fera pas de mal, autant laisser couler.

Faux. C’est l’une des idées reçues les plus implantées et de nombreux professionnels de santé, dont des gynécologues et des sages-femmes, dédramatisent le petit verre à Nouvel An ou au mariage du frangin. Mais les études sont formelles : il est impossible de savoir quelle est la quantité minimale d’alcool toxique pour le fœtus. Certains bébés vont présenter un syndrome d’alcoolisation foetale alors que leurs mères n’ont consommé qu’un seul verre pendant la grossesse alors que d’autres y échapperont bien qu’elles aient eu  une consommation plus fréquente.

Les troubles de l’alcoolisation foetale pourraient être dépistés plus tôt.

Vrai. Selon des chercheurs canadiens, il serait possible de développer des tests génétiques pour diagnostiquer le syndrome beaucoup plus tôt qu’au moment de la scolarisation. En effet, en analysant des échantillons d’ADN d’enfants présentant des troubles du Syndrome d’alcoolisation foetale, des chercheurs de l’Université de Colombie Britannique ont identifié des constantes qui permettraient l’élaboration de ces tests.

Les TSAF sont malheureusement sans traitement possible à l’heure actuelle.

Vrai. Cependant il existe une alternative pour aider l’enfant à vivre avec ses difficultés liées au Syndrome d’alcoolisation foetale : une prise en charge pluridisciplinaire plus précoce pourrait aider l’enfant dans ses acquisitions cognitives. Mais pas seulement : selon les chercheurs, de plus en plus d’éléments indiquent qu’il serait possible d’intervenir précocement afin de contrecarrer des effets sur le système nerveux jusqu’ici estimés irréparables.

Malheureusement, contrairement au tabac on a peu de possibilités pour orienter les patientes vers un service d’aide au sevrage.

Faux. Il existe un disposition d’aide à distance, Alcool Info Service, qui s’inscrit dans le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives et permet de bénéficier du soutien d’un professionnel expérimenté. Sur le site internet de ce dispositif existe aussi une rubrique destinée à apporter des réponses aux questions que ces femmes se posent, ainsi que des vidéos pédagogiques.

Le nombre de femmes enceintes n’ayant pas cessé de boire de l’alcool pendant leur grossesse est estimé à 7600.

Faux Il s’agit d’une évaluation à minima de 20% des femmes enceintes soit au moins 16 000 femmes enceintes selon l’enquête Périnatale 2010 (Inserm).

Les femmes enceintes ont peu conscience des risques qu’elles font courir à leur foetus.

Vrai. La sociologue Stéphanie Voutain (Université Paris-Descartes) a analysé en 2007 des discussions de 42 femmes enceintes sur des forums internet université Paris-Descartes). Il en ressort que ces futures mères ne comprenaient pas vraiment le risque de l’alcool et pensaient que certaines boissons alcoolisées étaient moins dangereuses que d’autres (alcool fort vs alcool léger) ou que le risque n’existait que pendant le premier trimestre. De même, les exemples de femmes ayant bu et n’ayant pas eu de soucis apparents avec leur bébé influent leur choix de ne pas prendre en considération les messages de prévention. Peut-être aussi insuffisamment relayés par le corps médical, tant l’alcoolisme au féminin reste un sujet tabou.

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